Lorsque les insectes butineurs sortent de leur hibernation, la recherche de nourriture est essentielle pour leur remise en forme. Au printemps, le vol du bourdon est le premier à se faire entendre. Saviez-vous que ce sont uniquement des reines? 

Seules survivantes de colonies qui se sont éteintes à la fin de l’automne dernier, elles sont à la recherche à la fois de nourriture et du meilleur emplacement pour le nid qu’elles construiront seules dans les prochaines semaines.

Le bourdon est-il le mâle des abeilles?

Le bourdon a l’allure sympathique d’une peluche. Il est dodu et tellement velu qu’on le dirait couvert de fourrure. En général, son corps est traversé de bandes jaunes et noires. Contrairement aux guêpes, aux abeilles et aux taons, le bourdon n’est pas agressif. Les mâles n’ont pas de dard et ne peuvent pas piquer. La femelle, par contre, en possède un et elle peut s’en servir plus d’une fois. Heureusement, elle est dotée d’un tempérament calme et pacifique. Il y a très peu de risque qu’elle vous pique, à moins que son nid ne soit menacé ou que vous vous en preniez à elle.

Le bourdon appartient au genre Bombus dans la famille des Apidae. Cette famille comprend, également, les abeilles mellifères (miel). Cependant, même si ces deux insectes ont un lien de parenté, l’abeille appartient à un genre différent de celui du bourdon. L’abeille est du genre Apis. Le bourdon est indigène à l’Amérique du Nord, c’est-à-dire qu’il est originaire et natif d’ici et l’abeille mellifère ou domestique a été introduite sur notre continent. Elle est originaire de différents pays d’Europe. Les bourdons et les abeilles appartiennent à deux espèces différentes. Le bourdon ne peut pas être le mâle des abeilles.

Le bourdon est-il un pollinisateur aussi efficace que l’abeille?

Abeilles et bourdons sont nos plus importants insectes pollinisateurs. Pour des raisons autres que la production de miel, le bourdon est un pollinisateur beaucoup plus efficace que ne l’est l’abeille à miel. Adapté à notre climat, le bourdon bénéficie d’une forte pilosité lui permettant de tolérer les températures fraîches. L’abeille à miel est frileuse! Elle attend 15°C avant de se mettre au travail. Ayant besoin du soleil pour maintenir sa chaleur corporelle, elle sera absente des grandes cultures et de nos jardins les jours où le ciel est gris. Elle évite de sortir sous la bruine de même que les jours de vent. Pour toutes ces raisons, sa saison démarre plus tardivement au printemps et cesse dès les premières fraîcheurs de l’automne. Au quotidien, sa journée débute en milieu de matinée et elle rentre à la ruche tôt en fin de journée.

De son côté, le bourdon est mieux acclimaté à nos conditions météo variables. Il est actif dès qu’il fait 5°C. C’est le premier pollinisateur du printemps et le dernier à butiner les fleurs à l’automne. Moins sensible à la présence du soleil, notre bourdon est actif les jours de ciel gris. Il poursuit son travail sous une pluie fine, se met à l’abri sous les feuilles, le temps que dure un orage et utilise le vent pour faciliter ses déplacements. Sa grande résistance lui permet de travailler un plus grand nombre d’heures et de jours par saison.

Le vol très particulier du bourdon.

Le vol d’un bourdon s’entend de loin. Sa façon unique d’utiliser ses ailes le distingue des autres pollinisateurs. Au lieu de battre l’air de haut en bas, les ailes du bourdon s’agitent plutôt d’avant-arrière, produisant ce son si caractéristique. Cette technique de vol lui est très utile. On l’appelle «pollinisation par bourdonnement» ou «pollinisation par vibration». Lorsqu’il atterrit au cœur d’une fleur, le bourdon active ses ailes qui atteignent alors 130 battements par seconde. Cette intense vibration secoue les étamines de la fleur qui laissent alors tomber son pollen. Notre bourdon se retrouve tout poudré et il s’affaire ensuite à recueillir tout le pollen répandu dans le fond de la corolle. Il dépose son butin dans les corbeilles à pollen accrochées à ses pattes et il s’envole rapidement vers une autre fleur.

Spécialiste des fleurs tubulaires

Le pollen collé à ses poils lui permet de polliniser les fleurs sur lesquels il butine. Il peut visiter 15 à 18 fleurs à la minute. Les fleurs de forme tubulaire comptent sur le colibri et sur le bourdon pour leur pollinisation.  Ces fleurs sont étroites et profondes. À cause de sa façon particulière de voler, le bourdon se glisse à l’intérieur du tube et collecte pollen et nectar.

La grande polyvalence du bourdon

Il y a également plusieurs plantes cultivées qui dépendent du bourdon pour leur fécondation. Dans la famille des Solanacées, il y a la tomate, le poivron, l’aubergine et la pomme de terre. Dans celle des Cucurbitacées, il y a le concombre, la courge, incluant le zucchini, et les melons. Parce qu’il est calme et sociable, des bourdons d’élevage sont maintenant utilisés dans les serres de production de tomates et de poivrons.

Un coup de main aux agriculteurs

Certains agriculteurs utilisent le bourdon pour polliniser leurs cultures de céréales et pour les plantes fourragères servant à nourrir leurs animaux d’élevage.

Une aide précieuse pour les abeilles

En insecte butineur infatigable, le bourdon apporte également son aide aux abeilles décimées par le syndrome de l’effondrement des colonies. Il travaille dans les champs de fraises, mûres, framboises, bleuets et canneberges.

Le travail du bourdon est complémentaire à celui de l’abeille, puisque celle-ci demeure dans la ruche lorsque les conditions météo ne lui conviennent pas. Ces deux précieux pollinisateurs s’entendent à merveille. Bien que l’abeille soit territoriale, elle ne manifeste aucune impatience ou agressivité en présence du bourdon. Il est même fréquent de les voir butiner côte à côte sur les mêmes fleurs.

Le bourdon produit-il du miel?

Tout comme l’abeille, le bourdon est un producteur de miel. Cependant, le volume de miel produit est insuffisant pour que l’homme puisse en bénéficier. Une «colonie» de bourdons compte entre 100 et 500 pollinisateurs. Une «société» d’abeilles comporte jusqu’à 50,000 membres. L’activité à l’intérieur d’une ruche d’abeilles peut se poursuivre pendant plusieurs années. Il est vital pour elles de maintenir une importante réserve de miel.

Si nous comparons

Une colonie de bourdons ne compte qu’un petit nombre d’individus et leur cycle de vie est de moins d’un an. Seules les jeunes reines fécondées survivront à l’hiver. Pour cette raison, les bourdons n’ont pas besoin d’accumuler des réserves de miel. Celui qu’il produise est destiné aux larves et nymphes (jeunes bourdons) surtout nourries de pollen, mais aussi d’un peu de miel et, pour les besoins de la reine. Un surplus sera prévu pour aider la colonie à traverser les périodes où les conditions extérieures pourraient paralyser leur travail.

Le plus souvent le nid est au sol

La reine bourdon construit seule le nid de la future colonie. Le plus souvent, il se trouve sous terre ou pas très loin du sol. Il peut être situé à la base d’une haie, d’un arbuste, une fissure dans un mur, le grenier de la maison, un trou dans un arbre, un nid d’oiseaux abandonné, un ancien nid de mulots, etc.

Si, dans vos travaux printaniers, vous êtes en présence d’un petit trou de la grosseur d’une pièce de 2,00$ et que celui-ci n’est pas prolongé par un monticule de terre comme ceux laissés par les mulots sur le gazon, il y a fort à parier que c’est un nid de bourdons. Surveiller s’il y a du va-et-vient et assurez-vous qu’il s’agit bien de bourdons. Si c’est le cas, placez un indicateur comme un mini drapeau ou autres objets qui attirent l’attention afin de ne pas oublier sa présence au cours de l’été et montrez-le aux enfants afin qu’ils ne s’exposent pas aux piqûres.

La reine bourdon couve ses œufs comme le font les oiseaux.

Dès que la reine bourdon a trouvé l’emplacement qui lui semble idéal pour son nid, elle passera plusieurs jours à y accumuler une réserve de pollen. Par la suite, elle construira une première cellule de cire que l’on nomme «pot de miel» et elle le remplira de nectar régurgité (miel).

Ceci fait, avec une partie du pollen mis en réserve, la jeune reine façonnera une boulette qu’elle badigeonnera d’un peu de nectar et elle y pondra entre 4 et 16 œufs. Elle placera ensuite sa boule de pollen contenant les œufs à proximité du «pot de miel», ce qui lui permettra de couver ses œufs et de boire du miel en même temps.

Comme le font les oiseaux, les reines bourdons couvent leurs œufs pour les garder au chaud. Ils doivent être maintenus à une température de 30°C. La reine quitte rarement ses œufs pendant la couvaison et après environ 4 jours, les œufs éclosent.

À savoir

On estime qu’une reine bourdon peut avoir à visiter jusqu’à 6000 fleurs par jour afin d’obtenir la réserve de nectar suffisante lui permettant de pondre et de maintenir la chaleur nécessaire à la couvaison de ses œufs.

De jeunes bourdons autonomes

Dès que les œufs éclosent, la reine bourdon enveloppe la boule de pollen et les jeunes larves en tissant un cocon. Le cocon est fait de soie produite par des glandes situées près de ses mâchoires. Les jeunes bourdons ainsi à l’abri à l’intérieur de leur cocon pourront se nourrir et terminer leur développement.

Pendant ce temps, la reine bourdon partage son temps entre le maintien de la réserve de pollen et la poursuite de ses pontes. Dès que des jeunes bourdons devenus adultes sont prêts à butiner, ils prennent la relève pour la collecte de nourriture et travaille à compléter la construction du nid. À ce stade, la reine restera désormais au nid.

Un nid pour un seul été

Le nid d’une colonie de bourdons ne ressemble pas à celui confectionné par les abeilles. Les abeilles construisent des alvéoles de cire extrêmement fine et de forme hexagonales qui formeront les différents rayons de la ruche. Ce sont des abeilles spécialisées, «abeilles cirières», qui en assurent la construction. Chez les bourdons, le nid est composé de cellules de cire ayant toute la forme de «petits pots». Ils sont soudés les uns aux autres et l’ensemble de la construction épouse la forme qu’a le nid plutôt qu’une forme géométrique parfaite.

Un nid de bourdons n’est pas énorme. Le plus souvent, il tient dans la paume d’une main d’homme. En raison de ses dimensions et le fait qu’il soit construit presqu’à la surface du sol, le nid ne risque pas d’endommager les racines de vos plantes.

Les bourdons ne sont pas agressifs sauf aux abords de leur nid. Les bourdons d’élevage travaillent des journées entières en serres de légumes, en compagnie des horticulteurs, sans que ces derniers se fassent piquer.

Le nid abandonné à l’automne

Ce nid sera abandonné à la fin de l’automne et il ne sera pas réutilisé à la saison prochaine. Les jeunes reines reviendront tout près d’où elles sont nées, mais pour y construire un nid tout neuf. Si des bourdons s’installent sur votre terrain, le message est clair et positif. Les bourdons ont trouvé chez vous et aux alentours, une profusion de nourriture pour assurer la survie de leur colonie. Bravo! Leur travail de pollinisation vous assurera d’abondantes floraisons et de bonnes récoltes au potager.

Comment aider les reines bourdons au printemps?

Lorsque les reines bourdons sortent de leur hibernation en avril, elles sont seules et le paysage manque cruellement de fleurs. Les chatons de saule, premières fleurs du printemps, lui procureront de la nourriture. Il faudra attendre le mois de mai pour qu’éclosent les fleurs de l’amélanchier et celle du forsythia. Suivront les tulipes et les autres bulbes printaniers.

Mais en attendant, la reine bourdon doit survivre. Si avril est doux, il y aura une abondante floraison, celle du pissenlit (Taraxacum). Cette fleur parfumée et comestible est, pour le bourdon, la plus importante source de nourriture qu’il peut trouver en ce début de printemps. Elle le sera également pour les autres pollinisateurs qui ne tarderont plus. Malheureusement, le pissenlit est mal-aimé et est considéré comme étant de la mauvaise herbe. Laisser fleurir ses pissenlits est mal vue et est considéré comme une marque de négligence !

Changer son regard

Cette «mode» de présenter un gazon ressemblant à un «vert de golf» provoque un empressement à faucher le pissenlit (tondeuse) dès qu’il apparaît. Chaque tête de pissenlit (capitule) contient jusqu’à 100 fleurs individuelles, appelées fleurons. Ils sont riches en nectar et en pollen et sont une précieuse source de nourriture pour tous les pollinisateurs.

Heureusement, depuis maintenant deux ans, différentes publicités et publications informent et incitent les gens à réapprendre à tolérer les pissenlits, du moins le temps que dure la floraison afin de venir en aide aux jeunes reines bourdons. Ce simple geste en est un de protection à l’égard de nos précieux pollinisateurs et une implication pour un environnement de qualité.

Tous nos pollinisateurs ont une valeur inestimable par le rôle qu’ils jouent dans l’équilibre des écosystèmes! Leur survie est menacée et leur disparition aurait une incidence certaine sur l’environnement, y compris l’environnement humain.

À savoir

Depuis plusieurs années, de vastes campagnes nous ont sensibilisés à l’effondrement des colonies d’abeilles. Des mesures de protection incitent les producteurs, agriculteurs ainsi que les jardiniers amateurs à adopter des comportements visant à les protéger. Les abeilles ne sortant qu’en milieu de matinée et rentrant tôt en fin d’après-midi, la régie d’applications de pesticides chez ceux soucieux de protéger les pollinisateurs se fait avant la sortie des abeilles ou après leur retour à la ruche.

Si vous avez lu tout cet article, vous savez que les bourdons sont déjà au travail dès le lever du jour et poursuivent leur tâche jusqu’en début de soirée. En étant aux premières lignes, ils subissent ses applications de pesticides et rapportent de la nourriture contaminée à leur nid. Leur population est menacée. Un pesticide, même s’il est bio, reste un pesticide. Tout ce que vous pouvez faire à la main leur sera salutaire ou encore, attendez la fin de la floraison pour agir surtout, si ce n’est pas une infestation.

Fan des bourdons!